MSIn_-_TRA_Methodologie/Syllabus/chap_etapes_obligatoires.tex

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\chapter{Etapes obligatoires ?}
%petite introduction : réponse générale à la question posée dans le titre
Pour un entraîneur, penser devoir faire chaque étape, aussi infime soit son apport dans l'apprentissage global, peut paraître peu encourageant.
Cependant, ces étapes lui fournissent un panel quasi infini d'exercices comme arsenal pédagogique à sa disposition pour maintenir la motivation et l'envie d'apprendre des élèves.\bigskip
Tenter, au moins une fois, la réalisation de chaque étape offre de nombreux avantages.
L'étude de certaines peut se limiter au strict minimum, mais un entraîneur ne perd rien à tout tenter avec son élève.\bigskip
\section{Réponse complexe}
Le problème commence réellement ici.
Comment savoir si une étape est facultative ?
Et dans le cas où elle le serait, pourquoi choisir de la demander quand même ? \ldots\bigskip
Une étape est facultative si elle ne participe pas directement à l'éducation de l'élève pour un but visé.
Mais, suivant le contexte, il peut être difficile, voire parfois impossible, de répondre précisément.
La notion de \textit{facultatif} dépend de :
\begin{itemize}
\item la figure vue,
\item la technique utilisée,
\item les contraintes de temps (s'il y en a),
\item \ldots
\item et, bien évidement, de l'élève :
\begin{itemize}
\item son niveau,
\item son potentiel,
\item ses appréhensions,
\item ses qualités/défauts techniques
\item sa capacité d'apprentissage à une période donnée,
\item \ldots
\end{itemize}
\end{itemize}
Autant d'éléments internes et externes qui complexifient l'identification des étapes de moindre importance dans une approche globale de l'apprentissage d'une figure.\bigskip
Cette difficulté d'identification est le premier argument pour lequel il faudrait tenter, au moins une fois, chaque étape.
Chaque étape que l'élève est capable de réaliser constitue un apport de nouveaux repères, de voies réflexes, d'aisance, \ldots à son vécu et à sa culture acrobatique
\section{Gain de temps ?}
La notion de "\textit{gain de temps}" n'existe pas en acrobatie : il est possible de tricher, de sauter des étapes, \ldots ~mais cela ne fait pas gagner du temps.
Tout au plus n'y aura-t-il pas de temps perdu.
Avec les années et l'expérience, un entraîneur peut enseigner aux élèves les choses plus rapidement (gain d'efficacité) parce qu'il aura identifié les points essentiels de chaque mouvement, qu'il aura une meilleure planification à moyen/long terme et qu'il mettra mieux à profit les capacités de chaque élève, le matériel à sa disposition ou le temps qui lui est imparti.
Mais le temps en lui-même, il n'en gagnera jamais.\bigskip
Dès qu'un élève est capable de réaliser une étape, l'entraîneur doit s'assurer que les actions musculaires essentielles sont réalisées et que la figure se rapproche autant que possible de la biomécanique idéale (compte tenu de l'élève).
Cela fait, l'élève peut passer à l'étape suivante, sans s'attarder inutilement.\bigskip
Passer une étape c'est prendre un risque pour le futur, c'est faire un pari.
Celui-ci peut s'avérer gagnant et l'entraîneur "gagnera" de nombreuses fois un peu de temps.
Mais tout ce temps récupéré sera un jour perdu : un jour, le pari ne payera pas et le temps perdu alors risque d'être plus important que celui gagné précédemment.\bigskip
De plus, un entraîneur ne devrait pas prendre de risques : sa matière première sont ses élèves (leur corps et esprit), souvent jeunes, avec leurs rêves, leurs espoirs et leur confiance (en eux-même et/ou en l'entraîneur), et un accident, même bénin, peut tout briser définitivement !
\section{Démarche sécuritaire}
Travailler par étapes et, surtout, essayer toutes les étapes permet d'accroître, même inconsciemment, le bagage acrobatique de l'élève et, bien loin d'être un fardeau, ce bagage pourra lui servir de nombreuses manières.\bigskip
\subsection*{Logique de travail}
\vspace{-0.4cm}
Le travail par étapes permet à l'élève de construire intellectuellement le chemin entre le niveau qu'il estime avoir et le niveau vers lequel l'entraîneur tente de l'emmener.
Cette construction, schématisation de la compréhension intellectuelle que l'élève a de son travail, lui permet d'avoir une approche personnelle, de s'approprier la démarche physique, de l'appréhender, et de s'y préparer psychologiquement.\bigskip
Cette préparation psychologique participera de manière non-palpable mais néanmoins conséquente à la réussite de l'apprentissage, ainsi qu'à la diminution des risques qui y sont liés.\bigskip
\subsection*{Technique de réchappe}
\vspace{-0.4cm}
En ayant pratiqué les différentes étapes et, par là même, leur arrivée, l'élève aura développé un système de repères (kinesthésiques, propriocepteurs, visuels) lui permettant de déceler très tôt et très vite une erreur de pilotage dans une figure acrobatique.
Mais, plus que cela, avec les différentes étapes connues, il pourra à tout moment d'une figure stopper le mouvement et, le cas échéant, repartir sur un autre connu.\bigskip
La pratique de ces étapes permet donc de donner à l'élève une meilleure appréhension de vécu partiel lors de figures mais également de lui apporter des voies réflexes et un contrôle de celles-ci qu'il n'aurait peut-être pas eu sans cela.\bigskip
\subsection*{Diminution du risque}
\vspace{-0.4cm}
Plus il y a d'étapes, plus la "distance" entre elles est petite, donc plus simple à franchir pour l'élève.
Et plus elle est simple, plus le temps nécessaire pour la franchir est court.
De plus, le risque réel ou imaginé pour l'élève diminue également.
Il vaut parfois même mieux avoir beaucoup de petites étapes plutôt que quelques grandes.\bigskip
\section{Diminution de la peur}
L'élève sent, même inconsciemment, qu'il a une meilleure maîtrise de ce qu'il fait.
Il sait qu'à tout moment il pourra stopper une figure pour s'arrêter à une étape intermédiaire ou partir sur une autre figure.
Cela participe à réduire la perte de confiance lors d'incidents mais aussi à réduire l'appréhension, le stress et la peur qu'un élève peut connaître.\bigskip
Cependant, il restera toujours la peur de la dernière étape : la réalisation complète.
Avec le stress de la première fois, la pression de l'entraîneur, l'encouragement des autres, \ldots ~l'élève aura toujours peur d'avoir un mauvais réflexe, de partir dans un mouvement incontrôlé.
Il faudra donc veiller à réduire le plus possible le pas entre l'avant-dernière et la dernière étape.
Pour ce faire, la méthode globale nous offre de parfaites solutions.
Il faudra donc veiller à ne pas la négliger.
\section{La toile de la culture acrobatique}
L'apprentissage au trampoline peut être vu comme une toile d'araignée.
Chaque étape est le croisement de deux fils.
Plus il y a d'étapes, plus il y a de fils et moins il y a de risque de trous dans la culture acrobatique du gymnaste.
Ces multiples étapes participent à sa sécurité de manière directe et indirecte en lui fournissant un bagage de vécu et de sensations (physiques, visuelles, spatiales, \ldots) qui lui seront utiles dans le pilotage de figures acrobatiques, qu'elles soient complètes ou non.
Et pour avoir le plus grand nombre d'étapes, il faut mêler méthode globale et part-method avec logique et intelligence, tout en tenant compte de la qualité de réalisation de ces étapes, du but visé, du délai souhaité et de l'élève.\bigskip
Pour reprendre une image déjà vue dans le module de biomécanique : plus l'élève réalise d'étapes dans son apprentissage et plus son cône s'agrandit.
Il ne s'agit bien sûr pas ici de son équilibre physique mais bien de son aptitude à piloter des figures acrobatiques en toute sécurité.\bigskip
\section{Conclusion}
Le travail d'un entraîneur ne se limite pas à faire en sorte qu'un élève soit constamment en situation d'apprentissage et d'évolution et ce, dans la sécurité la plus grande à chaque instant.
Son travail d'aujourd'hui est également de préparer le travail qu'il fera demain et d'utiliser tous les artifices possibles pour augmenter l'efficacité de l'apprentissage des prochaines figures.\bigskip
Sa méthodologie de travail a une importance significative - pour ne pas dire capitale - sur les résultats, le bien-être à long terme et l'évolution de ses élèves.
Le choix et l'application de celle-ci doivent être fait consciencieusement et en toute connaissance de cause.\bigskip
En tant que méthode analytique, la part-method s'oppose fondamentalement à la méthode globale, pour laquelle la figure recherchée est à appréhender de manière complète et indivisible.
Cependant, et en dépit de cette opposition supposée, il est tout à fait possible, et même recommandé, d'enseigner une figure à la fois de manière analytique (part-method) et de manière globale.
La méthode globale n'est pas opposée à la part-method, c'est en fait sa duale !\bigskip %(tout comme l'enseignement de la lecture mélange la lecture analytique, qui consiste à décomposer les mots en sons, et la lecture globale, qui consiste à "photographier" les mots dans leur ensemble). (Comparaison trop lourde pour être acceptable ici. A mettre en note en bas de page, peut-être ?)
En effet, l'exécution d'une figure complexe de manière globale (avec manipulation, ceinture, fosse ou en milieu aménagé) permet d'appréhender les sensations, ce qui constitue une part incontournable de l'apprentissage acrobatique, et qui n'est pas abordée lors d'un apprentissage orienté uniquement sur la part-method.\bigskip
La meilleure méthodologie serait alors peut-être une combinaison subtile des trois méthodologies vues précédemment : regrouper l'ensemble des exercices fournis par la part-method et la méthode globale réunies, puis les organiser à la manière des familles d'action (et/ou d'autres familles).
On peut ensuite envisager l'apprentissage en lui-même à la façon de la part-method, étape par étape, complétée aussi souvent que possible par une approche globale.\bigskip
Il n'est pas nécessaire de choisir un camp, les trois méthodes peuvent s'alterner au niveau d'un entraînement, d'une saison ou d'une carrière.
Le tout doit être effectué de manière raisonnée et avec une planification tenant compte des échéances (si vous en avez) et des capacités de l'élève.\bigskip